Autrefois, la bourgeoisie décrivait l’ouvrier comme un oisif, un alcoolique en puissance. Aujourd’hui, il est un fraudeur aux allocations sociales, alors que les fraudes des assurés représentent tout au plus 1% des comptes de la Sécu, contre 80% (16 milliards) liés aux cotisations patronales impayées et au travail dissimulé.
Pendant ce temps, la fraude fiscale est un « sport de classe », une jouissance perverse. Les paradis fiscaux sont connus. Ils coûtent à l’État français 40 milliards d’euros par an. Par ailleurs, les représentants de la classe dominante imposent leur vulgarité : Berlusconi, ses partouzes et ses chaînes de télé ; Sarkozy qui demande à un publicitaire de lui trouver une femme, l’Etonien Boris Johnson, maire conservateur de Londres qui, lors d'une campagne électorale, lance le mot d’ordre suivant : « Votez conservateur car votre femme aura de plus gros seins et vous une BMW M3 » (Voting Tory will cause your wife to have bigger breasts and increase your chances of owning a BMW M3.). C’est en transgressant sans vergogne que le dominant « prend le pas sur le dominé, lui-même tenté de se replier sur un individualisme de dernier recours en abandonnant utopies et luttes collectives. »
Il faut être un Pujadas pour s’étonner que des travailleurs désespérés puissent casser du matériel. Cette exaspération n’est qu’une faible et très sporadique réponse aux humiliations endurées quotidiennement, comme le racontent des ouvriers des Ardennes reçus par le préfet : « Il nous a facturé le nettoyage de la moquette du bureau où nous avons été reçus, car nos chaussures portaient encore la trace des pneus que nous avions fait brûler pour donner de la visibilité à notre action. »

Avez-vous récemment entendu un dirigeant prononcer le mot « ouvrier » ? .
Le discours dominant édulcore la réalité. Il n’y a plus de clochards mais des SDF, plus de chômeurs mais des sans-emplois. Les plans de licenciement sont des plans sociaux, voire des plans de sauvegarde de l’emploi. Les privatisations sont des cessions d’actifs publics. Le discours « arrache aux individus un consentement volontaire aux règles qu’il impose ». En premier lieu, son temps, qui doit être productif, même la nuit. Il faut que le travailleur « désire » faire des heures supplémentaires, et que, comme dans tout univers totalitaire, il « aime » Big Brother, son exploiteur.
« Quoi qu’ils fassent, « les dominés ont tort »
Extrait de :
https://blogs.mediapart.fr/bernard-gensane/blog/061013/michel-pincon-et-monique-pincon-charlot-la-violence-des-riches